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 Texte sans titre....( a voir pour un concours...)

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Melley
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Melley


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MessageSujet: Texte sans titre....( a voir pour un concours...)   Texte sans titre....( a voir pour un concours...) Icon_minitime1Dim 27 Mai - 15:46

Voilà je l'ai écrit aujourd'hui...dites moi ce que vous en pensez...^^


Je ne me souviens plus de mon ancienne vie. Et pourtant, les rares bribes que mon esprit m'envoie sont lumineuses. Douces. Paisibles.
Alors que je suis entourée de ténèbres. D'abysses. De profondeurs obscures d'où je ne ressortirais plus. Chaque souvenir que je garde, je m'y raccroche, je m'agrippe à lui, de peur de tomber encore plus bas si je le lâche. Je rêve de retourner en arrière. De changer le cours du temps. D'effacer cette partie de ma vie. Mais je sais que cela est impossible.

J'entends les sirènes des voitures de polices, mais je ne les vois pas. J'entends du monde autour de moi, qui s'agite, qui court, qui hurle, mais je ne suis pas avec eux. L'on recouvre mon corps meurtri et nu d'une couverture tiède. Je n'arrive même pas à sourire pour les remercier. Mes yeux sont aveuglés par toutes les lumières, aussi je trébuche souvent, mes jambes ne veulent plus me porter, on doit me soutenir fermement pour éviter que je m'écroule. Je sens que l'on me force gentiment à m'asseoir. J'obéis. Cela fait trois ans que l'on me force, et que j'obéis. Trois longues années. Et l'on vient enfin de me retrouver. Si j'avais su…je n'aurais pas renié mes amis ou ma famille. Si j'avais su je ne l'aurais pas suivi. Mais voilà…on ne peut pas savoir à l'avance.

On me parle, on me réconforte, mais je n'entends rien, ne comprends rien. Je reste enfermée dans le mutisme complet. D'ailleurs, je ne sais même plus si je suis capable de parler. L'on m'allonge à l'arrière d'une ambulance, les portes se referment, j'entends le moteur qui redémarre et nous voilà partis. Je m'éloigne de ma prison. Et je reste là, les yeux grands ouverts sur le plafond de la voiture, docilement. Je sais que je vais devoir me reconstruire. Je sais que je vais devoir parler pour raconter. Mais cela m'est trop dur à concevoir.
Autour de moi, l'on s'active toujours, on panse mes plaies, on nettoie mon corps, on fait le minimum en attendant d'être à l'hôpital. Et moi je suis ailleurs. Vide. Je devrais être heureuse que l'on m'ait retrouvée. D'avoir la certitude de vivre encore de longues années. Mais je sais que cela ne sera plus pareil. Les souvenirs resteront, brûlants dans mon cerveau. Les souvenirs et les marques physiques. L'on va m'affubler du nom de "traumatisée", les psychologues voudront tous me venir en aide, ma famille va pleurer à chaude larmes en me voyant…et moi je n'ai envie que d'une chose, qu'on me laisse en paix. Qu'on me laisse reconstituer les évènements. Qu'on me laisse faire le tri, y voir plus clair. Peut-être même comprendre. Intérieurement, je ricane. Je suis la victime et je ne comprends absolument rien. Comme si j'avais subis un lavage de cerveau pendant trois ans, me laissant aussi molle qu'un ballon dégonflé.

L'ambulance s'arrête, et tout le monde sort, se préparant à me sortir également, sur ma civière. La lumière du soleil m'aveugle, je ferme les yeux. Tout le monde cri encore et toujours, on court à l'intérieur. J'entends néanmoins un cri qui me déchire :
-MA FILLE !!! Laissez-moi la voir !!!!
La voix de ma mère. Je la reconnais encore. Je veux tourner la tête, la voir aussi, mais j'en suis incapable. Mon corps ne veut plus bouger. Les infirmiers la tiennent à l'écart et je n'entends pas ce qu'ils lui disent. Soudain, on entre dans le bâtiment, on slalome dans de longs couloirs blancs immaculés, je vois les lumières qui défilent au-dessus de ma tête. On entre dans un ascenseur. Mon cœur s'emballe. Je n'aime pas rester ainsi. J'ai horreur de cela. Je regarde à droite, à gauche, paniquée. Vite…Les portes se rouvrent, on court dehors. On appelle des médecins, on me fait entrer dans une chambre. Moi je commence à sombrer. Mes yeux ont envie de se fermer. D'oublier. Ou de se souvenir. Je ne sais pas moi-même. La dernière chose que je sens, c'est mon corps que l'on soulève pour le déposer sur un matelas confortable. La dernière chose que j'entends c'est :
-Vite, un médecin, on la perd !

Puis, plus rien.

A part des souvenirs. Je laisse mon cerveau divaguer, m'emmener loin en arrière. Bien avant tout ceci. Quatre ans auparavant. J'avais…quinze ans, à l'époque.

******


Je suis une belle jeune fille, pleine de vie, intelligente, sympathique. Au lycée, tout le monde m'apprécie et demande mes conseils ou mon aide. Je ne suis pas grande, sans pour autant être petite. Mes longs cheveux noirs ondulent le long de mes épaules, encadrant mon visage fin. Mes yeux verts sont étincelants, mon nez est droit et parfait, ma bouche souriante. Une fille parfaite pour certains. Moi, je me vois comme une fille normale. Parce qu'il y a bien plus beau ou belle que moi. Il y a toujours mieux. Je suis au lycée, en seconde plus précisément. Tout se passe à merveille. Les cours sont intéressants, les professeurs sont tous ou presque corrects, la classe est soudée…je ne pouvais rêver mieux. Mes notes sont à la hauteur de mes espérances, je plafonne à quinze de moyenne. Nous en sommes au deuxième trimestre. Ma meilleure amie depuis le primaire, Justine, est à mes côtés et, ensemble, nous discutons sur tout et n'importe quoi.
-Ce type là-bas, apparemment il se tape toutes les filles du lycée.
Justine est une fille qui aime parler garçons. Moi pas. Les garçons ne m'attirent pas plus que cela. Je ne cherche pas l'amour. Elle si.
J'hausse les épaules et rétorque :
-Tant pis pour elles.
Elle me regarde, écarquillant les yeux et s'exclame :
-Ce n'est pas leur faute !
-Si. Elles se laissent avoir.
Elle rit et je la suis de bon cœur. Elle connaît mon avis sur les hommes, je connais le sien, et nous nous amusons à plaisanter dessus. Justine à aussi tout pour plaire. Ses grands yeux bleus se marient bien avec sa chevelure dorée, qui descend bien plus bas que la mienne. Son visage est tout aussi beau, sa bouche pulpeuse qui invite le baiser. Elle a déjà eu des petites histoires. Moi jamais. Et pour le moment, seules mes études comptent. Je veux devenir professeur de lettres plus tard. La sonnerie retentie et nous nous rendons docilement en classe, suivre le cours d'espagnol, que nous avons toutes deux choisie en option.

A midi, nous retrouvons d'autres gens de la classe à la cantine. Il y a Marc, l'intello du groupe, Tim, le sportif, Marie, la rebelle. Nous cinq, nous formons un bon groupe. Nous nous asseyons près d'eux et commençons à manger. Tim, toujours à rire, demande à Marc combien de temps il peut courir sans s'arrêter. Marc l'ignore et pose une autre question :
-Et toi, combien de calculs de maths es-tu capable de résoudre sans que ton cerveau explose ?

Tout le monde rit. Tim s'amuse à taquiner notre intello préféré, tandis que ce dernier contre-attaque. Je suis bien. Tout le monde est bien. Je mange en riant, en plaisantant. Une vie de lycéenne tout à fait normale…

A treize heures, nous retournons en cours. Cette fois, c'est avec moins d'enthousiasme. C'est le seul prof que nous n'apprécions guère. Il enseigne la physique-chimie. Il est sadique et n'hésite pas à punir pour un rien. Je n'aime pas aller dans son cours. Surtout lorsque nous l'avons deux heures d'affilée. Et il m'a prise en grippe. Il n'arrête pas de m'interroger, de m'observer, de me punir. Et je n'ai pas le droit de répliquer, sinon c'est pire. Alors au bout de dix minutes de cours, il pointe le doigt vers moi et me dit :
-Jenny, nous t'écoutons. Qu'avons-nous fait la dernière fois ?
Je me lève, je réfléchis. C'est toujours la même chose. Je relis toujours mes cours la veille. Et lorsqu'il s'agit de parler, j'oublis tout.
-Nous…avons vu les différentes…lois…de la gravité…
Il sourit et je comprends que la punition va tomber.
-Tu as à moitié juste. Mais pour l'autre moitié, dommage. Tu me recopieras le cours deux fois pour demain.
Je me rassois, affichant un air calme. Justine me murmure :
-Il faudra dire quelque chose au conseil de classe. Il ne peut pas continuer comme ça.
Je la regarde, sourit en coin et dit :
-Nous en sommes au deuxième trimestre, Justine. Il en reste plus qu'un. Je pense que je survivrais.
Elle me regarde mais ne réponds plus rien. Je sais que cela devrait me faire quelque chose. Je devrais aller me plaindre à l'administration. Mais cela ferait de moi quelqu'un de lâche qui demande de l'aide aux grands. Et cela ferait plaisir au professeur. Ce que je ne veux pas. En somme, ce furent à nouveau les deux heures les plus longues de toute notre vie. Tout le monde soupire en sortant, trop heureux de pouvoir rentrer à la maison. Oui, nous n'avons plus cours à partir de quinze heures les lundis.
Justine, Marc, Marie, Tim et moi flânons en ville. Nos parents ne rentrent pas encore, et nous profitons du beau temps. Marie fait une mini-révolution sur la terrasse du café :
-On ne peut pas continuer comme ça ! Il faut aller le dire ! Je ne le laisserais plus s'acharner sur nous !
Tim rit avec Marc. Justine hoche de la tête, en accord avec Marie. Moi je réponds :
-Cela ne servirait à rien à part le faire jouir.
Et, cette fois, tout le monde explose, moi compris. Nous buvons ainsi, parlons, rions, tout le temps.


******

Je rouvre les yeux difficilement. Des gens sont au-dessus de ma tête. Je sens une aiguille dans mon bras. Ils me sourient en voyant que je suis éveillée. Ils passent une lumière sur mes yeux. Ils prennent mon pouls. Mais les souvenirs me rappellent une nouvelle fois…

******


Un nouvel élève est arrivé ce matin. J'ai été surprise. Nous sommes en fin d'année et il vient. Mais apparemment ses parents déménagent souvent et ce n'est donc pas la première école qu'il fréquente depuis septembre. Je ne peux m'empêcher de le plaindre. Même pas le temps de s'attacher aux gens qu'il faut partir. Il s'installe à mes côtés, seule place libre. Justine a été déplacée pour bavardage quelques mois auparavant. Il se nomme Alex. Je lui donne quelques uns de mes cours, pour qu'il rattrape. Il est gentil et nous discutons vivement, à voix basse, sous le regard inquisiteur du professeur. A la pause, nous sortons et je le présente au groupe qui l'accueille chaleureusement. A voir son air ébahi, il n'a pas l'habitude d'être intégré aussi rapidement. Mais Tim commence tout de suite à lui parler de sport, le questionnant sur ses passions. Justine et Marie pouffent dans leur coin, sans que je comprenne leur raison. Moi je regarde le tableau, adossée au mur. Alex est séduisant. Il a de beaux cheveux noirs en bataille, des yeux tout aussi sombres, un visage aux traits droits et parfaits.
Il rit avec tout le monde, raconte sa vie, nous parle de tous les déménagements qu'il a connu. Il a déjà visité beaucoup de pays du monde. Nous sommes scotchés à ses lèvres tant il raconte bien. Nous en oublions même la sonnerie et ce n'est que lorsque le surveillant nous cris dessus que nous sursautons et courons rejoindre notre classe en s'excusant platement. En français, je suis encore plus sérieuse que dans les autres matières. Je dois exceller là-dedans, pour mon futur métier. Justine veut se mettre à mes côtés, comme toujours, mais Alex arrive et demande gentiment s'il peut avoir la place, pour rattraper les cours. Justine hausse les sourcils et se retire, se plaçant derrière nous, avec Marie.
Me souriant, il me dit :
-J'espère que cela ne vous dérange à toutes les deux.
Je lui réponds :
-Non, ne t'en fais pas. Nous arriverons à surmonter l'épreuve.
Il sourit, dévoilant des dents parfaites. En plus, il a un timbre de voix mélodieux. Je me demande s'il ne fait pas du chant. Moi j'en fais, j'ai apparemment une voix magnifique. Je lui donne une nouvelle fois les cours, nous discutons discrètement et je l'aide à suivre. Nous étudions en ce moment un Molière, qui n'est pas simple.
En fin de journée, lorsque nous nous séparons au portail du lycée, je me rends compte que j'aime être auprès d'Alex. Je le cherche du regard pour lui dire au revoir, et mon cœur s'emballe lorsque je l'aperçois, plus loin. Je m'approche de lui, après un dernier salut à Justine et lui dit :
-Tu rentres comment ?
-A pied. Tu habites ou ?
-Deux pâtés de maisons plus loin.
Je lui indique du doigt à peu près l'emplacement et il sourit en s'exclamant :
-J'habite pas loin ! On peut marcher ensemble alors ? Je ne connais pas encore très bien la route à suivre.
-Bien sur. Je lui réponds.
Nous commençons donc à marcher, l'un à côté de l'autre. Soudain, il déclare :
-C'est la première fois ou je me sens aussi bien dans une ville. D'habitude j'ai un sentiment de manque. Mais pas cette fois.
Je souris.
-C'est peut-être parce que nous sommes là.
Il hausse les épaules.
-Oui je pense. Vous êtes un groupe soudé. J'aime bien. Et vous êtes tous sympa. Merci encore de me donner les cours.
J'acquiesce patiemment. Puis il me demande :
-Je pourrais passer chez toi prendre le reste ?
-Bien sur, mes parents ne sont pas encore là.
Il sourit et nous accélérons le pas. Je ne voudrais pas que mes parents le voient. Sinon ils s'imagineraient des choses. Et comme cela, il ne sera pas gêné.
J'entre le code de l'appartement, pousse la porte et le guide à travers les couloirs, escaliers, paliers. Il est stupéfait et me suit docilement. J'entre la clé dans la serrure, la fait tourner et pousse la porte, m'écartant pour le laisser entrer. Je lui prends son gilet que j'accroche à côté du mien et l'invite à s'installer pendant que je chercher les cours les plus récents.
-C'est vraiment beau chez toi, dit-il.
-Oui.
Je ne peux rien répondre de plus. Il est vrai que notre appartement est joliment décoré, sans excès ni pauvreté. Tout est bien agencé, la lumière passe partout. Bref, il fait bon-vivre et tout le monde se sent chez soi dans cet appartement. Alex s'est assis sur une chaise et je pose les cahiers devant lui, lui demandant s'il veut à boire. Il accepte et je repars, pour revenir avec deux verres de coca en main. Il en boit une gorgée, me remercie et commence à feuilleter les cahiers.
-Vous avez fait pas mal de choses !
-Oui, nos professeurs veulent boucler les programmes. Pour que l'an prochain nous soyons prêts.
Il hoche de la tête tout en lisant des cours. Moi je le regarde. Il est beau, je dois l'avouer. En fait, c'est la première fois qu'un homme me fait cet effet…

******

L'on me sort de ma torpeur avec une décharge électrique. Je ne comprends pas mais ouvre subitement les yeux.
-C'est bon, elle est avec nous !
C'est un médecin qui a presque hurlé dans les oreilles. Pourquoi ne me laisse-t-on pas tranquille ? Je veux bouger les jambes, n'y parvient pas. Je n'ai pas assez de forces. Je plie et déplie mes doigts sous la couverture. Je sens toujours l'aiguille dans le bras. Et j'entends quelqu'un sangloter. Je tourne difficilement la tête et voit mes parents, ma mère contre le torse de mon père qui la rassure. Ils ont tellement changé…lorsque le médecin dit à mes parents que c'est bon, elle se précipite à mon chevet et me caresse tendrement les cheveux. Moi je l'observe, simplement. Elle a plus de rides que dans mon pauvre souvenir. Ses cheveux se sont éclaircis, ils virent au blanc maintenant. Elle a des cernes sous les yeux, des traits tirés. Je n'ose même pas imaginer l'inquiétude qu'ils ont eue. Mon père apparaît à ses côtés. Lui aussi a pris un coup de vieux, ses cheveux sont pratiquement tous tombés, et ses cernes rivalisent avec ceux de ma mère. Je tente un petit sourire, qui fait redoubler les larmes de ma mère. On ne dit rien. Pas la peine. L'on est content de se revoir. Mais mes yeux se referment. Je n'ai pas fini de me remémorer…

******

Cela fait plus d'un mois qu'Alex est avec nous maintenant. Nous nous sommes beaucoup rapprochés. Il me raccompagne tous les soirs, et parfois reste pour que l'on fasse des devoirs ensemble. En cours, il est pratiquement toujours à mes côtés. Je mange plus avec lui, je reste avec lui aux pauses, oubliant les autres. Je ne sais pas ce que j'ai. Justine me l'a même reproché, une fois :
-Réveille-toi ! Nous sommes là aussi nous ! Qu'est-ce que tu as donc ma vieille ?
-Rien. Je n'ai rien.
Mais elle ne comprend pas et s'en va, rejoindre les autres, qui ne me parlent presque plus. Mais je m'en fiche. Je suis avec Alex et j'aime bien sa compagnie. Un soir, alors que nous regardons la télévision en l'absence de mes parents, assis sur le canapé l'un à côté de l'autre, il me dit subitement :
-Je t'aime beaucoup tu sais.
Je le regarde, surprise. Que veut-il dire ?
-Euh…moi aussi je t'apprécie beaucoup mais…
Il pose un doigt sur ma bouche en chuchotant :
-Chut…
Mon cœur bat la chamade et je ne comprends pas. Il effleure ma joue du doigt, pendant que son autre main descend le long de ma jambe. Au contact, je frissonne. Se peut-il que …? Son visage s'approche du mien. Je le regarde, presque paniquée.
-Que veux-tu dire…je souffle.
Mais il ne répond pas. A la place, ses lèvres viennent trouver les miennes. Ma première réaction est de me dégager. Il aurait pu me dire quelque chose ! Mais c'est si doux que je me laisse fondre dans ses bras. Ses lèvres se pressent contre les miennes de plus en plus sauvagement, cherchant à les ouvrir. Et lorsqu'il y parvient, sa langue prend le relais, trouvant la mienne, s'enroulant, ne faisant qu'un. Sa main serre ma cuisse et il bascule sur moi, me forçant à m'allonger. Sauf que je ne veux pas aller plus loin. Je m'arrache à l'étreinte et lui dit :
- Non…je …je ne veux pas encore.
Je ne sais pas ce que j'ai. Ce baiser était merveilleux. Il sourit et me dit :
-Alors on attendra.
Et il m'embrasse dans le cou. Je frissonne à chacun d'eux. Je n'ai jamais connu cela. Et c'est venu spontanément. Je ne lui ai rien demandé. Mais maintenant, je sais ce que c'est que d'aimer quelqu'un. Parce que je mets un nom sur ce sentiment que j'éprouve depuis quelques temps en sa compagnie : l'amour.
Je me redresse, l'obligeant à se rasseoir. Je me mords la lèvre, souriante.
-Tu es merveilleuse.
Je souris encore plus et je ne sais pas quoi répondre.
Malheureusement, il doit s'en aller avant que mes parents débarquent. Alors je le raccompagne et lui dit au revoir. La porte refermée, je courre dans ma chambre et me jette sur le lit. Qu'est-ce que cela signifie ? Est-ce que l'on est ensemble? Est-ce qu'il m'aime, ou était-ce un test ? Je ne sais pas. Mais j'ai peur du lendemain. Ma première pensée est d'appeler Justine, de lui raconter. Puis je me souviens qu'elle est en colère après moi. Comme les autres. Parce que je passe trop de temps avec Alex, que je renie mes amis, et parfois même mes études. Mais c'était si merveilleux…j'ai encore son goût sur les lèvres. Je flotte sur un nuage, ne voyant plus que lui. Même dans mes rêves. Il est toujours là. Et maintenant, je sais ce que c'est, l'amour.

******

Cette fois, pas besoin de décharge pour me réveiller. J'ouvre les yeux, et je constate qu'il fait nuit. A côté, j'entends des respirations. Je tourne lentement la tête et voit mes parents, allongés sur des lits de camps, main dans la main. Me remettant droite, je laisse les larmes couler lentement. Les souvenirs deviennent de plus en plus brûlants. Mais il le faut. Il faut que je me souvienne. Je serre les poings et déglutit. Je voudrais me voir, m'observer dans un miroir. Mais je ne peux pas me lever. Et les mots restent dans ma gorge. Alors je me rendors une nouvelle fois.

******


Je n'écoute plus en cours. Je ne travaille plus. Les professeurs l'ont remarqué et ont voulu convoquer mes parents. Mais à chaque fois je déchire les lettres et supprime les messages de leur répondeur. Ce soir, Alex m'emmène chez lui. Pour la première fois. Main dans la main, nous marchons dans la rue, nous embrassant de temps en temps. Depuis le premier baiser, notre relation s'est concrétisée. Nous sommes ensemble. Il m'aime également. Justine ne me comprend pas. Elle me parle, mais sans plus. La dernière fois, elle m'a dit de me méfier. Quelque chose chez Alex ne lui plaît pas. Moi je lui ais simplement dit qu'elle était jalouse. Elle est repartie, vexée. Moi je m'en contre fiche de ce qu'elle ou les autres pensent. Il n'y a plus que lui et moi. Seuls sur la terre, avec notre amour. Il me fait entrer chez lui. C'est bien plus sobre que chez moi, et en pagaille. Il ferme la porte à clé. Je fronce les sourcils.
-Pourquoi fermes-tu ?
-Parce qu'il y a de drôles de personnes à l'étage. Et pour éviter d'être dérangés.
-Tes parents rentrent quand ?
-Je ne sais pas.
Je fronce encore plus les sourcils. Il ne m'a pas regardée en parlant. Et c'est en général signe de mensonge. Il me fait m'asseoir sur son lit, pendant qu'il cherche des boissons. Sur les murs, il y a des photos. Je me lève pour les regarder. Il y a lui, a différents âges, des filles, des animaux mais pas de parents. Lorsqu'il revient, il se précipite pour me faire rassoir.
-Désolée…je murmure.
-Ce n'est pas grave. Mais…non rien.
Il est vraiment bizarre. Il s'assoit à côté et met une main derrière ma hanche, m'attirant à lui. Comme j'aime être dans ses bras ! Il commence à m'embrasser le cou, tendrement. Il devient pressant. Ses caresses aussi. Je vois ou il veut en venir. Mais moi je ne suis pas prête, je ne veux pas. Pas encore. Alors je le repousse une nouvelle fois et lui dit gentiment :
-Je ne suis pas prête pour cela encore…
Il me regarde mais ne dit rien. Et, d'un coup, j'ai peur. Parce que j'ai vu dans son regard de la colère, de l'impatience. J'ai peur de ce qu'il pourrait faire. Parce que personne ne sait que je suis ici. J'ai éteint mon téléphone. Et il a fermé la porte à clé. Il se remet à m'embrasser, mais j'ai tellement peur qu'il doit le ressentir. Il s'arrête, boit un coup et me dit, brutal :
-Qu'est-ce que tu as donc maintenant ?
Je sursaute devant le ton et réponds :
-Rien…je…rien.
Il se lève, tourne en rond dans la pièce. Puis il se lâche :
-Cela fait près d'un mois que l'on est ensemble ! Je n'ai pas le droit à une preuve d'amour de ta part ? J'ai suffisamment attendu non ?
Je baisse la tête et regarde mon verre.
-Oui…mais je vais avoir seize ans…je suis trop jeune encore…
Il rit.
-Trop jeune ? Laisse-moi rire. Il est temps pour toi de connaître cela.
J'ai tellement peur à présent que je tremble. Je me relève, pour lui faire face. Ma mère m'a toujours dit de ne pas me laisser faire pas un homme.
-Je suis trop jeune oui. Et je ne veux pas gâcher ma première fois.
Il renifle et hausse le menton. Puis il s'approche de moi et me tort violemment le bras. Je cris et je sens les larmes venir.
-Arrête ! Qu'est-ce que tu fais ?!
Il me tort tellement le bras que je suis forcée de me courber pour éviter la fracture. Et, sans que je m'y attende, il me gifle et me jette dans la pièce. Je perds connaissance.

******
Je n'ouvre plus les yeux. La peur est de nouveau là. Les souvenirs deviennent durs. Il fait toujours nuit. Je ne sais pas combien de temps je reste assoupie, ni combien de fois je me suis déjà réveillée ainsi. J'ai soif. Ma salive ne suffit pas. Et d'un coup, les souvenirs me happent de nouveau.

******

Je me réveille avec un mal de tête horrible. Je me tortille et me rends compte que je suis attachée. Mes poignets sont liés derrière mon dos, mes chevilles sont elles aussi ligotées. Je veux hurler, mais un bâillon m'en empêche. Je suis dans le noir complet, je ne sais pas ou je suis. Je me souviens juste d'Alex, de la gifle et du trou noir qui m'a emportée. J'ai peur. J'ai froid. J'entends de l'eau qui goutte. Soudain, une porte s'ouvre, laissant passer un rai de lumière qui m'aveugle. Et je reconnais la silhouette d'Alex dans l'embrasure. Il allume la lumière et referme la porte. Là, j'observe le tout. Il y a un lit sommaire, une sorte de toilette, une étagère. Les murs sont nus et froids. Il s'agenouille à mes côtés, m'effleure la joue. Mais je ne frissonne plus de plaisir. Je suis terrorisée. Il susurre :
-Je n'aime pas, lorsque l'on me désobéit.
Je le regarde, l'implorant du regard. Il me soulève comme si je ne pesais rien et me jette sur le lit. La peur se répand de plus belle dans mes veines. Il me détache les chevilles à l'aide d'un couteau. Il enlève le bâillon.
Aussitôt je crie. Et pour me faire taire, il me gifle violemment.
-Tu te tais d'accord ? Le moindre bruit et je te tue.
J'hoche de la tête et il sourit, satisfait. Justine avait raison…j'aurais du me méfier. Maintenant, personne ne sait ou je suis, pas même moi. Il me détache à présent les poignets que je ramène contre ma poitrine, les frottant nerveusement. Je ne sais pas ce qu'il va me faire. Je ne sais pas de quoi il est réellement capable. Je sursaute lorsque je sens la lame du couteau se faufiler sous mon tee-shirt. D'un geste sec, il tranche le tissu et retire le vêtement. Le pantalon suit rapidement, ainsi que mes sous-vêtements. Je me retrouve nue et paralysée. Avec mes bras et mes jambes, je tente de cacher ma féminité, mais il me les enlève de force et me contemple.
-Au fait, il faut que je te dise…je n'ai pas de parents. J'ai atterri dans votre lycée de merde parce qu'il fallait que je me réinsère dans la société. J'ai passé trois ans en maison de correction pour jeunes délinquants.
Je sens mon sang se figer dans mes veines. Il rit sournoisement et se relève, non sans avoir caressé un de mes seins au préalable. Il éteint la lumière, ferme la porte. J'entends la serrure tourner et les pas s'éloigner. Je ferme les yeux et tente de calmer mon cœur. Me voilà prisonnière. Je panique. Je veux me relever, je marche à tâtons, me cogne contre l'étagère. Grimaçant, je m'éloigne, recherche le lit. Je m'allonge dessus, me tourne vers le mur, me met en position fœtale, et ferme les yeux. Un mauvais rêve. Un simple cauchemar c'est tout…


******

Je crie. Pour la première fois depuis que je suis allongée à l'hôpital, je crie. Un cri qui réveille immédiatement mes parents, qui accourent vers moi. Ma mère me prend la main et la serre tout en me rassurant, tandis que mon père alerte des infirmiers. Je pleure, je m'en rends compte. Je pleure à chaudes larmes, je tremble, mais le contact avec ma mère apporte une certaine chaleur.
-Tu n'as plus rien à craindre, ma chérie…c'est fini…
Ma mère murmure, m'embrasse le front. C'est fini…mais pas dans mon esprit…

******

La porte se rouvre. Je me recroqueville au fond de mon lit, genoux contre ma poitrine. Si j'ai bien compté, si je n'ai pas perdu le fil des jours, cela fait pratiquement un mois que je suis sa captive. Je ne sais pas ce qu'il se passe au-dehors. Je ne sors jamais. Alex pose le plateau avec un peu de nourriture et repars sans un mot. Je m'approche et, d'une main faible j'agrippe la tartine qui est posée dessus. Au moins, il ne me laisse pas mourir de faim. Mon corps est marqué de coups. Dès que je ne fais pas ce qu'il veut, il frappe, c'est simple. Il évite légèrement le visage. Il ne donne que de simples gifles. Alors que sur mes jambes, mon ventre, mon dos, il y va violemment, utilisant même des ceintures, des fois. Et il l'a fait. Il m'a ôté ma virginité de force. Et ce fût un supplice. Il est arrivé au milieu de la nuit, nu également. J'étais éveillée. En fait, je ne dors pratiquement pas, tellement j'ai peur. Il s'est allongé sur moi. Ses mains se sont faites baladeuses. Et je n'ai pas réussi à me défendre. J'ai tenté, en vain. Et lorsqu'il est entré en moi…j'ai hurlé. Hurlé jusqu'à ce qu'il me plaque la main sur la bouche pour me faire taire. Il a continué ainsi, moi pleurant voulant le mordre pour qu'il me lâche. Il faisait si mal…plus rien à voir avec le doux jeune homme qui m'avais embrassée, des années auparavant… Une fois son travail accompli, il est reparti en riant. Moi je suis restée prostrée dans le lit, n'osant esquisser le moindre geste. J'avais mal, je souffrais à l'intérieur comme à l'extérieur à présent. Je prie chaque jour pour que Justine ait parlé à la police. Qu'elle leur ait dit qui était Alex. Parce qu'elle avait eu un bon pressentiment. Elle m'a prévenue pourtant. Et je ne l'ai pas écoutée. Et maintenant…je ne suis pas sûre de la revoir un jour…Mes cheveux ont poussé, mes ongles aussi. Mais je me les casse en griffant le mur, comme si je pouvais creuser un trou dans la pierre et m'évader. Cela aussi j'ai essayé, de m'enfuir. Pas la peine. Il est trop grand, trop violent, trop rapide.

Je pleure tout le temps ou presque. Chaque nuit il revient, et recommence. Chaque nuit pendant des heures, me laissant presque sans vie, anéantie. Je me raccroche aux visages de mes parents, à celui de Justine, de Marc, de Marie, de Tim. Je les vois et les revois en boucle dans ma tête, pour me dire qu'il faut que je me batte. Pour ne pas lâcher prise. Parce que je veux les revoir un jour. Je ne lui parle pas. Je le laisse faire. Cela évite les coups. Mais j'ai toujours mal. Parce que je ne veux pas. Je ne veux plus. Et, parfois, lorsque leurs visages ne suffisent plus, que je sens que je sombre peu à peu, je me parle. Je murmure des choses anodines. Des choses évidentes :
"Je me nomme Jenny, j'ai seize ans. Je suis en seconde. J'aime les pâtes. Le ciel est bleu, le soleil se lève à l'est. Les oiseaux volent et les poissons nagent…".
Des évidences qui me permettent de revenir à la raison et continuer à me battre. Un mois. Qu'est-ce que cela peut être long…

******

Ma mère pleure près de moi. Les souvenirs sont là, mais ils me permettent d'ouvrir les yeux. Je ne suis pas partie, maman. Je voudrais le lui dire, mais je n'arrive pas. Ma bouche ne veut pas laisser échapper le moindre mot. Depuis le cri, je n'ai plus proféré un seul son. Mais je sens que mon corps recouvre petit à petit des forces. J'arrive à bouger les jambes et les pieds. Mes mains sont plus vigoureuses, je parviens à les sortir de la couverture. Et j'arrive à esquisser un faible sourire. Je voudrais savoir ce qui est arrivé à Alex. Comment ils m'ont retrouvée. Ce qu'ils ont fait pendant ces trois années ou j'avais disparu de la planète.
Doucement, je pose ma main sur la tête de ma mère qui se redresse d'un coup. Elle me voit et sourit.
-Ma chérie…je ne t'abandonnerais plus…
Mon père m'embrasse également et ajoute :
-Nous sommes là. Repose-toi, tu n'as rien à craindre.
Je les crois. Et je repars.

******

Un an et demi. Un an et demi enfermée dans cette pièce. Il m'autorise à me laver une fois toutes les deux semaines. Cela me permet de savoir depuis combien de temps je suis là. Ou alors il le fait exprès pour que, justement, je désespère. Lorsque je me lave, il reste à côté, me regardant. Et parfois, je sens sa main revenir là ou il ne faut pas. Je le laisse faire et pleure en silence. L'eau sur mes plaies du dos me brûle, mais j'ignore cette douleur. Évacuer la crasse est bien mieux. Une fois fini, il me jette à nouveau dans ma prison, referme la porte et m'abandonne des heures et des heures durant. Parfois même des jours, j'en suis persuadée. Mais il revient toujours. Me frapper, me violer, me martyrisant à souhait. Il me parle, des fois. Il me raconte sa vie avant. Il me dit qu'il a déjà tué une femme, ce qui lui a valu son séjour en maison de correction. Mais il s'est échappé. Personne ne l'a rattrapé. Jusqu'à ce qu'il viole trois autres femmes et les laissent mourir. Ils ont été encore plus durs, l'enfermant et le surveillant nuit et jour. Mais il s'est bien conduit. Alors ils ont décidé de le réinséré dans la société. Il a donc atterrit dans notre lycée. Il m'a rencontrée…je l'ai aimé…et maintenant, je le hais. Il me dégoûte. Cette aversion se rajoute à la liste des choses qui me permettent de vivre. Une fois de temps en temps il me donne un journal. Pas du jour même, mais je le lis avidement, mot par mot, phrase par phrase. Il est souvent question de moi. Cela le fait rire. La police tourne en rond. Justine a donné le signalement d'Alex. Ils savent qui chercher. Mais ils ne trouvent pas. Il y a des photos de moi, des avis de recherche, des photos de mes parents aussi. Et je me balance d'avant en arrière sur le lit, déboussolée, anéantie, me maudissant. Les jours s'étirent…un an et demi…Alex est convaincu qu'ils perdront espoir. Qu'ils me déclareront morte. Moi je ne le crois pas. Pas mes parents. Ils espèreront jusqu'à leur dernier souffle s'il le faut. Je le sais…

******

Je veux savoir. Mon cerveau est en ébullition. Je veux connaître la vérité. Je ne veux plus ressasser mes souvenirs. Plus maintenant. Parce que les deux ans qui ont suivis étaient exactement pareils. Je me redresse en position assise sur le lit. Mes parents dorment à nouveau, mais il fait jour. Je retire les draps qui me couvrent. J'en peux plus d'être allongée. Je veux marcher. Je veux oublier pour quelques instants, revenir à la vie, revenir au jour actuel…Je pose mes pieds au sol et la terre tangue devant mes yeux. Là, je vois un miroir sur la table. Fébrilement, je l'attrape, manquant de le faire tomber, et je me regarde. Mes joues sont devenues creuses. Mes yeux n'ont plus cette étincelle de vie, ils sont comme éteints. J'ai des cernes, comme mes parents. Des marquent de coups encore. Mes cheveux sont en désordre. Je ne suis plus moi. Et je ne le serais jamais plus. Je veux me lever complètement, lorsque la porte s'ouvre sur une infirmière qui, en me voyant, appelle du renfort et me remet au lit.
-Met-la sous sédatif. Il ne faut pas qu'elle s'agite.
Je les regarde. Je veux leur dire que je vais bien. Je veux leur parler, poser des questions. Mais je sens une aiguille se planter dans mon bras, un liquide couler dans mes veines, et je me sens à nouveau partir.

******

Deux ans et environ sept mois. Je compte, jour après jour. Je compte sans relâche. Je suis maigre. Très maigre. Il m'apporte toujours encore une tartine le matin et une autre le soir avec un verre d'eau pour la journée. Mais je maigris à vue d'œil. J'ai du mal à me battre, à me maintenir éveillée, à me garder en vie. Il ne vient plus la nuit, ou alors très peu. Il assouvit toujours ses besoins, me frappe toujours, mais plus aussi souvent. Comme s'il…comme s'il voyait que je n'étais plus utile, qu'il n'avait plus rien à tirer de moi. Et cette pensée me fait encore plus peur que le reste. S'il n'a plus besoin de moi, va-t-il me tuer ?
Je reste recroquevillée sur le lit. Devant moi gisent les journaux qu'il m'autorise à lire. Je vois les photos de mes parents. Même dans le noir. Elles sont gravées sur ma rétine. Je connais les articles par cœur. Je les récite en boucle. Mes amis désespèrent. Mes parents continuent les recherches. Le dernier journal fait mention d'une nouvelle piste, sérieuse cette fois. Cela me fait garder espoir.
Alors quand, deux semaines après, la porte s'ouvre sur deux policiers, mon cœur saute de joie. Ils crient qu'ils m'ont retrouvée, m'emmène à l'extérieur. Mon supplice est fini. Ou alors il ne fait que débuter…

******

Le sédatif n'agit plus et me renvoie à la vie. Ouvrant encore une fois les yeux, je fixe le plafond. Je viens de revoir toute la période. Et étrangement, je suis calme. J'ai toujours mal, j'ai toujours peur, mais je me rends enfin compte que je suis libre. Libre, vivante, et avec mes parents. Ceux-ci apparaissent devant moi, souriants. Ils me montrent la porte du doigt et je tourne la tête.
Et là j'arrive à sourire légèrement. Justine, Marc, Marie et Tim sont là. Ils ont grandis. Ils ont tous changés. Les hommes ont des poils sur le menton. Marie a des cheveux plus longs alors que Justine ce les ait coupés. Ils s'approchent de moi et me serrent tour à tour la main. Justine pleure sur l'épaule de Marc. Je suis si heureuse. Mes parents, mes amis. Ils sont tous là. Justine m'aide à me mettre assise, mettant mon oreiller contre le mur. Puis ils parlent tous en même temps. Je ne comprends pas tout. J'écoute des morceaux, je me laisse enivrer par leur voix qui m'avait tant manquée. Ils se sont tout de suite inquiétés et ont prévenus mes parents. Mes parents les ont interrogés. Ils ont parlé d'Alex. Ils sont allés voir la police. Mais celle-ci n'a pas voulu les croire, disant que c'est une fugue d'amourette passagère et que je reviendrais. Force fût pour eux d'admettre que j'avais bel et bien disparue un mois et demi plus tard. Alors les recherches ont été lancées. Ils ont interrogé le quartier, les profs, les élèves…Et Justine hurlait qu'il fallait chercher Alex. Mais il avait disparu sans laisser d'adresse. Alors, quand les policiers ont remonté le temps et découvert qui était réellement Alex, presque un an après le début des recherches, ils ont appelé le centre de correction, demandant pourquoi ils l'avaient relâché, pourquoi ils ne l'avaient pas suivit, ni attaché un bracelet émetteur, pourquoi ils n'avaient pas mentionné son passé. Personne ne comprenait. Et, finalement, deux ans, huit mois et trois jours après ma disparition, ils ont réussis à suivre sa trace alors qu'il marchait dans la rue. Idiot, il n'a pas pensé à se camoufler plus que de nécessaire. Ils l'ont suivit et l'on appréhendé alors qu'il voulait entrer. Maintenant, il est en prison et il y passera le restant de ses jours. Ils ont défoncé la porte, ont fouillé toutes les pièces jusqu'à me retrouver. J'en ai les larmes aux yeux. Je me rends compte que je suis furieuse. En prison ? Je voudrais le voir mort.
-Nous sommes si heureux de te retrouver…déclare Marie, d'une voix brisée après leur récit.
Ils acquiescent tous et je leur souris. Puis je prends la main de mes parents et ouvre la bouche. Je sens que je vais réussir à parler.
-Je…merci…
Deux mots qui sortent avec difficulté, mais qui enchantent tout le monde. Une semaine à l'hôpital sans parler, les médecins pensaient que j'étais devenue muette. Et les médecins sont aussi heureux que je ne sois pas tombée enceinte. Moi aussi. Parce que je n'aurais certainement pas gardé le bébé. Aussi cruel que cela paraisse.

Les jours suivants, ils viennent tous, me racontent tout, les cours, le lycée qui s'était mobilisé pour aider dans les recherches…j'écoute et je tente de tout retenir. Mais je n'y arrive pas. Les souvenirs sont trop présents. Les psys viennent aussi et me parlent pendant des heures. Ils me font parler aussi et je raconte comme je peux. Ma voix est encore éraillée, mais peu à peu les mots glissent plus facilement en-dehors de mes lèvres. Ils me posent une question et se taisent, attendant que je parle, leur calepin et leur stylo prêts à l'emploi. Les yeux dans le vague, les souvenirs surgissant une nouvelle fois, je raconte. Je parle des souffrances, de l'attente, de la peur. Je ne dis pas tout. Et toutes les nuits je fais des cauchemars plus horribles les uns que les autres. Je hurle alors, me redressant brusquement, trempée de sueur, les cheveux collant à mon front, pleurant. Alors ma mère arrive et me serre contre elle, m'apaise. Les médecins disent que c'est normal. Que j'évacue.

Je reste donc plus d'un mois à l'hôpital. Puis vient enfin le jour ou, déclarant que je suis assez en forme, les médecins m'autorisent à rentrer chez moi. Avec les séances de rééducation, mes jambes ont réappris à marcher et me porter. J'ai peur de rentrer. En fait j'ai peur de sortir tout court. Mes parents prennent mes affaires, mon père me prenant un bras et m'aidant à avancer. Je longe les couloirs prudemment et je me retrouve dehors trop vite à mon goût. Le soleil m'éblouie à nouveau et j'emplis mes poumons d'air pur. Mais dès que je reporte mon attention sur la rue, les passants se transforment en Alex. Je vois son visage partout. Alors je cri et courre vers la voiture de mon père. Je saute dedans et ferme la porte, lui disant de démarrer vite. Il obéit et je reste tranquillement sur mon siège, apaisant mon cœur. Alex est en prison. Il ne viendra plus. Il n'est plus là. C'est fini. Je suis libre et vivante. Je vais me reconstruire. Avec mes amis et mes parents. Je rentre chez moi.
Ma chambre n'a pas changée. Ma mère n'y entrait plus que pour faire un peu de ménage, en prévision de mon retour. Elle est restée à l'époque de mes quinze ans. Maintenant j'en ai dix-huit, bientôt dix-neuf. Mais la vue de mes posters, affiches, photos, me fait pleurer. J'avance, comme dans un rêve, et j'effleure les draps, le bureau, les cahiers, les photos, les peluches. J'effleure, je caresse, je touche. C'est chez moi. Ma mère range mes habits et reste à mes côtés.
-Que veux-tu manger ce soir ma puce ?
-Des pâtes.
Elle hoche de la tête, m'embrasse le front et me laisse.
-Ne ferme pas la porte ! Je crie.
-Ne t'en fais pas.
Elle la laisse grande ouverte et j'entends ses pas s'éloigner dans le couloir de l'appartement. Je ne veux plus être enfermée dans une pièce, seule. Je prends un cahier et voit sur une page un gros cœur avec Alex marqué au centre. De rage, je le déchire, le jette à travers la pièce. Je fais de même avec tous les autres cahiers. De toute façon, mon avenir est foutu pour le moment. Je n'ai pas passé mon bac. J'ai pris trop de retard. Enfin, je verrais plus tard. Je sors de la chambre en désordre et m'aventure dans le couloir. J'ouvre toutes les portes, atterrit dans la salle de bains, aux toilettes, dans le débarras…je souris à chaque fois et lorsque j'arrive au salon, je ne peux empêcher le souvenir de mon premier baiser d'apparaître devant mes yeux. Les meubles n'ont pas changé non plus. M'ennuyant, j'aide ma mère à préparer le repas. Il faut que je m'occupe. Mes mains tremblent tant que je casse deux assiettes. Je m'excuse, je culpabilise mais ma mère me rassure et nettoie les débris. Mon père entre avec un gros bouquet de fleurs pour ma mère et un cadeau pour moi. Je l'ouvre et y trouve un magnifique bracelet avec mon prénom gravé dessus. Je le laisse me le mettre au poignet et je les embrasse tous les deux. Je suis si heureuse…
Pourtant je sais que je n'ai pas fini. Il va falloir que je me réhabitue à la vie. Il va falloir que j'affronte mes peurs. Que j'ose sortir. Que j'ose retourner en classe. Que je ne fasse plus tous ses cauchemars.
Je suis traumatisée, c'est vrai. Mais je fais face. Je dois y arriver.

Aujourd'hui, je souris à la vie. J'ai vingt ans. Mon kidnapping est encore présent dans ma tête. Mais plus lointain. J'arrive maintenant à sortir seule dans la rue, à aller au lycée seule. Je recommence en première. Je n'ai pas abandonné l'idée d'être professeur plus tard. Et le proviseur à bien voulu me laisser recommencer. Mes amis sont tous en fac, en BTS ou ailleurs. Mais l'on se voie toujours. Et j'ai d'autres amis à présent. Aucun ne me parle de cette période. Ils respectent ma douleur. Depuis peu, je suis avec un homme. Nicolas. J'ai mis longtemps, très longtemps, à accepter qu'un autre homme que mon père me touche. Mais il a été patient. Il m'a aidée. Il a dix-huit ans. Et il est compréhensif. Nous ne nous sommes pas encore embrassé, mais il a maintenant le droit de me tenir la main sans que je sursaute et le repousse. Il sait que je fais tout ce que je peux pour surmonter cette peur qui m'étreint encore. Parfois, j'essaie moi-même de le tenir, mais je n'y arrive pas. Mes mains sont comme rejetées. Alors il continue à me parler et à se montrer patient. J'ai repris du poids aussi. Bien sûr mon dos est toujours zébré à cause des coups. Mais ce n'est pas grand-chose.
Je me reconstruis petit à petit, avec l'aide de psys, de mes parents, de mes amis, de Nicolas et même des professeurs.
Alex croupit toujours en prison ou il est traité de la pire manière par les autres détenus. Cela me laisse froide. Je m'en fiche de lui. Je ne veux qu'une chose, qu'il soit mort. Comme sa, je serais certaine qu'il ne pourra plus faire de mal à quiconque. Cela m'aiderait encore plus. Mais bon…
J'en parle qu'à la maison. Parfois, à table, je lâche un morceau de ma captivité. C'est plus fort que moi. Mes parents m'écoutent mais ne disent rien. Nicolas ne me pose pas de question, je lui en suis reconnaissant.

En fait, tout est fait pour que je revive pleinement. Et je ne compte pas les décevoir…

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Hiyoru
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MessageSujet: Re: Texte sans titre....( a voir pour un concours...)   Texte sans titre....( a voir pour un concours...) Icon_minitime1Lun 28 Mai - 12:17

Ouah... J'ai lu tout le texte et, franchement, au début je ne pensais pas que tu allais faire ça. Pauvre Jenny, ça été la désillusion totale...
C'est fort sombre comme texte. Je plains vraiment cette petite; passer trois ans à la merci d'un fou quelle horreur !
Sinon, ton texte est très bien juste une ou deux fautes de distraction que j'ai repéré ici et là, je ne saurais plus dire lesquelles, mais c'est bien écrit et tout.
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Melley
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MessageSujet: Re: Texte sans titre....( a voir pour un concours...)   Texte sans titre....( a voir pour un concours...) Icon_minitime1Lun 28 Mai - 13:05

Merci beaucoup d'avoir pris le temps de le lire !

Oui je sais pas super joyeux...en même temps...je n'arrive pas à faire dans la joie...
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Malou
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MessageSujet: Re: Texte sans titre....( a voir pour un concours...)   Texte sans titre....( a voir pour un concours...) Icon_minitime1Mar 13 Nov - 22:49

ouha ! j'avais tout lu sans commenter....

Alors je fais maintenant (même si tout est un peu flou, pas le courage de relire ce gros pavé...) !
C'est vrai que c'est sombre... Mais bien écris !
*relis des bouts* ah ! mais c'est atroce ! On sait déjà que ça va pas, et on se rend compte de toute l'horreur, vers la fin, plus ça avance, plus on sait, plus on veux que ça s’arrête.... brrr...
mais c'est bien de raconter le "après". Pas que la délivrance des policiers, tout ce qui suit, sa vie qui est bouleversée, comme continuer à vivre doit être dur pour elle... J'aurais peut-être aimé un peu plus de présent, ce qu'elle est devenue après, ne pas raccourcir ce bout là... Mais très bien ! Smile
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MessageSujet: Re: Texte sans titre....( a voir pour un concours...)   Texte sans titre....( a voir pour un concours...) Icon_minitime1Mer 14 Nov - 14:07

Merci pour le commentaire Malou !

Oui je pourrais continuer...ça m'a déjà traversé l'esprit....surtout que je souhaiterais participer au prix du jeune écrivain et qu'il faut minimum 5 pages, or celui-ci n'en fait que 4...enfin...après ça dépend quand je l'aurais mis selon leurs critères mais bon...faut que je voie !
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